Je profite de la floraison d'un des miens pour faire une fiche de culture de cette espèce très peu répendu en culture et pourtant si intéressant:
Stylidium debile
Fig. n°1: plant de
Stylidium debile Un peu de systématique:Stylidium debile appartient à la famille des Stylidiaceae. Celle-ci est notamment proche de la famille carnivore des Byblidaceae et comprend environ 300 espèces réparties en 5 genres: Forstera, Levenhookia, Oreostylidium, Phyllachne et Stylidium (le genre Donatia, pourtant très proche, a été rangé dans une famille à part: les Donatiaceae). Ces genres sont répartis principalement en Australie, Tasmanie et Nouvelle-Zélande mais on peut observer quelques espèces en Nouvelle-Guinée, Inde, Chine et Japon. Une seule espèce, appartenant au genre Phyllachne, a atteint l'Amérique du Sud, plus précisément la Terre de Feu.
Le genre Stylidium comprend à lui seul plus de 250 espèces (je n'ai pas de données sur le chiffre exact qui varie avec les auteurs). Le maximum de diversité se situe en Australie, puis suivent la Tasmanie et la Nouvelle-Zélande. Plusieurs espèces se trouvent aussi en Nouvelle-Guinée et il faut en rajouter quelques unes ayant atteint l'Inde, la Chine et le Japon.
Histoire & éthymologie:Le genre Stylidium est connu du monde occidental depuis le tout début du XIXe siècle. Son nom anglais de Triggerplant signifie littéralement "plante gâchette". En effet, les fleurs de ce genre possèdent la particularité d'avoir leurs parties fertiles organisées en "gâchette": les filets des étamines sont soudés autour du style en une colonne, et cet ensemble est rejeté sur le coté de la fleur. Lorsqu'un insecte vient à frôler la base de la colonne, la "gâchette" se déclenche et l'ensemble de la colonne est projeté du côté opposé de la fleur, laissant ainsi un peu de pollen sur le dos de l'insecte. L'insecte part alors vers une autre fleur dont il déclenche la "gâchette" et le stigmate vient récupérer le pollen sur le dos de l'insecte.
Fig. n°2 a et b: Fleur de
Stylidium debile avant déclenchement de la "gâchette" (notez le positionnement des anthères sur la colonne) et après déclenchement
Au contraire de la Dionaea, ce mouvement peut s'effectuer un nombre illimité de fois et prend très peu de temps (moins de cinq minutes) à revenir dans sa position initiale. Le genre Stylidium n'est pas le seul a avoir cette particularité, il la partage avec le genre Levenhookia de la même famille.
Système de capture:Le piège des Stylidium consiste en des tentacules collants ressemblant à ceux des Drosera. Il se trouve principalement sur les sépales des fleurs, parfois sur l'envers des pétales ou sur l'axe de l'inflorescence. Enfin, chez quelques espèces, on en trouve aussi sur les feuilles. Le caractère carnivore du genre Stylidium a été démontré tout récemment par Darnoski (Darnowski et al., 2007)
Vu la petitesse des poils glanduleux, ils ne peuvent piéger que des organismes de très petite taille, inférieure à celle des pollinisateurs. On pense qu'au début de l'évolution du genre, il s'agissait d'un système de protection de la plante afin d'empécher les insectes rampants et/ou de petites tailles de venir profiter du nectar sans déclencher la "gâchette" ou de venir voler le pollen. Les Stylidium auraient alors évolué vers la carnivorité, leur apportant un avantage nutritif lors de la fructification.
Fig. n°3: fleurs de
Stylidium debile. On voit très bien les poils glanduleux sur les sépales et l'envers des pétales.
Je détaillerai ici la culture de l'espèce
Stylidium debile, la plus facile d'entretient et la plus courante en culture actuellement.
Milieux naturels: Cette plante pousse naturellement dans des tourbières d'Australie de l'Ouest, et très souvent en compagnie de Drosera et Utricularia. Le climat y est sub-tropical.
Luminosité:
Elle nécessite du plein soleil, sinon elle a tendance à s'étioler et à ne pas fleurir, même sous très forte luminosité et sous néons.
Température :
Cette espèce semble supporter de très fortes températures (plus de 40°). Je n'ai pas vraiment testé sa résistance au froid mais elle semble supporter des températures relativement basse. Pour une bonne culture, je conseillerai de ne pas descendre en dessous de 5°C.
Humidité du substrat:
Je cultive plusieurs espèces de climat différents mais toutes semblent s'accomoder d'une simple soucoupe d'eau, voir un substrat maintenu juste humide. Et ce, toute l'année.
Humidité de l'air:
Grosse surprise, le degré d'hygrométrie de l'air ne semble pas un point très important. Je l'ai cultivé aussi bien en terrarium avec plus de 90% d'humidité ou dehors en plein courant d'air, les plantes poussent très bien dans toutes les conditions, pourvu que le substrat soit un peu humide.
Substrat :
Pour ma part, substrat classique 70 % de tourbe blonde avec 30% de sable de quartz.
Multiplication:
La plante produit naturellement de très nombreux rejets jusqu'à envahir complétement son contenant. Il suffira alors de les détacher.
Une autre méthode consiste en la bouture de tête. Coupez la tige avec le bourgeon caulinaire et replantez la dans le substrat, en même pas un mois vous aurez un nouveau plant bien enraciné.
Le semi de Stylidium est particulièrement difficile, seules les graines fraîches donnent de faibles résultats.
Fig. n°4: détail de la rosette de feuilles de
Stylidium debile.
Rempotage & taille du pot:
Je n'ai pas encore eu à faire de rempotage et même un substrat tassé semble lui convenir tellement cette espèce et peut exigente. Un pot profond et peu large est le plus adapté pour cette plante, mais les racines finiront quand même par sortir par les trous de drainage tellement elles semblent longues. Evitez la cohabitation avec les autres plantes, elle finira par les étouffer.
Période de repos:
Elle semble ne pas en nécessiter et pousse toute l'année en conditions tropicales.
Floraison:
Toute l'année si les conditions sont bonnes.
Parasites et maladies:
Pas observés pour le moment, elle semble increvable et repart facilement des racines.
Bibliographie:Douglas W. DARNOWSKI,
Triggerplants. Rosenberg Publishing, 2002.